Azeroth Adventurers' Chronicles
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 Veraña - Honneur et respect

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Lil
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MessageSujet: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:52

Avertissement
Ce récit est destiné à un public averti en raison des thèmes sensibles qui y sont abordés. Merci de votre compréhension et bonne lecture.


Première partie


            -Il a dit que vous n’avez pas fait aussi bien que nous le dernier entraînement, répéta le worgen de sa voix timbrée. Il demande à ce que vous balayiez la cour avec les recrues en guise de sanction.
Il fronça le museau en terminant de parler. Face à lui, une femme qui ne faisait pas la moitié de sa taille était assise sur un lit de camp. Elle le fixait en silence ; finalement, le worgen sortit après avoir brièvement salué. Resta derrière lui un parfum musqué, qui était familier à présent.
-Il dépasse les bornes, murmura Veraña.
La jeune femme ne portait que la moitié de son armure ; elle avait délaissé pour l’heure les épaulières, les gants et la cape. Sa poitrine soulevée par une respiration trop rapide tendait le tissu de sa chemise.
Elle se leva et écarta brutalement le rideau de la tente pour sortir. Elle marcha à grandes enjambées, c'est-à-dire à pas tranquilles pour un worgen, jusqu’au petit bâtiment en bois non loin et toqua avec force sur la porte.
Au bout de cinq minutes, elle s’ouvrit. L’homme derrière s’adossa au chambranle. De toute évidence, lui aussi était en repos pour le moment ; sa chemise blanche était ouverte sur son torse.
Evidemment, il peut se permettre, songea Veraña avec ironie. Il en ferait une tête si je faisais pareil.
Elle serra les mâchoires une brève seconde en saluant son supérieur. Le regard gris de l’homme la détailla rapidement. Son visage marqué d’une cicatrice à la mâchoire arborait un demi-sourire sarcastique.
-Ah, Sang-de-Loup. Vos camarades ont-ils transmis la consigne donnée vous concernant ?
Veraña réprima un regard noir. La dernière fois qu’elle avait refusé ce sobriquet, cela ne s’était pas bien terminé.
-Sauf votre respect, chef, vous ne pouvez pas me demander une telle tâche. En tant qu’officier…
-Vous me devez obéissance, quel que soit votre rang, coupa l’homme d’un ton indifférent alors que son regard balayait le visage de la femme.
Veraña s’obligea à inspirer pour ne pas s’énerver. Elle connaissait bien l’armée et savait qu’à chacun on pouvait demander n’importe quelle tâche si son supérieur estimait qu’il fallait lui rappeler l’humilité ou le sanctionner.
-Chef, c’est immérité, lança-t-elle à voix basse en sachant qu’elle dépassait les bornes.
Son supérieur accentua son petit sourire et lui fit signe, presque gentiment, de rentrer. Sur ses gardes, elle fit un pas à l’intérieur. Il referma aussitôt la porte ; il fit sombre, d’un coup.
Veraña se retrouva dos au mur alors que l’homme perdait son sourire. Il attrapa une dague à sa ceinture et se mit à jouer avec sans la quitter des yeux.
-Si j’estime que c’est mérité, souffla-t-il d’une voix plus rauque, c’est que ça l’est. Vous savez combien ça peut vous coûter, insubordination à un supérieur ?
La gorge de Veraña se serra. Elle n’aurait pas dû aller jusque là. Elle aurait dû encaisser en silence, comme d’habitude.
-Je vous présente mes excuses, dit-elle en s’arrachant les mots un à un.
Un rire sombre fut la seule réponse.
-C’est tout ? murmura l’homme en se rapprochant brutalement d’elle. Oh, mais j’oubliais.
Il regarda le petit visage encadré d’ondulations noires, le corps menu et si féminin. Veraña sentit ses joues s’empourprer, de colère et de honte.
-Vous semblez plus apte à vous excuser qu’à agir en soldat de l’Alliance. Qui croirait que vous êtes un soldat en vous regardant, hein ?
-Je suis officier de l’Alliance depuis quatre mois, lança Veraña sans avoir pu se retenir.
-On se demande comment vous avez fait, dit l’homme en attrapant son visage d’une main sèche. Vous avez accueilli votre ancien supérieur entre vos cuisses ?
Veraña dégagea son visage avant de lui lancer un regard furieux. Son chef ouvrit alors soudain la porte d’un coup de pied.

-N’oubliez pas, Sang-de-loup. Votre corvée faite avant six heures ce soir. Sinon, ce sera le double, et vous aiderez les palefreniers.


Dernière édition par Lil le Jeu 12 Nov - 9:19, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:53

-J’ai appris ce que Corvin t’a fait faire, murmura une voix de basse. Il n’aurait pas dû.
-Laisse.
-Non, c’est vrai, toute l’unité pense comme moi. Il peut pas te blairer.
-Ce sont des choses qui arrivent.
-Soit il veut ta peau, soit il…
Le worgen se tût, n’osant terminer sa phrase. Veraña soupira.
-Je préférerais embrasser un troll que coucher avec lui.
La comparaison fit s’esclaffer brièvement son camarade.
-Je file, ça va pas tarder à être ma garde de nuit.
-Que la Lumière veille sur toi.
L’homme hocha vaguement la tête, attrapa son fourreau et se leva.
-On se voit au prochain tour.
La toile de la tente claqua et Veraña enfonça son visage dans son oreiller. Elle savait bien qu’elle aurait dû se montrer plus courageuse, laisser tous ces petits évènements couler sur elle sans l’atteindre, se montrer forte… Mais là, après la centième humiliation, elle n’avait qu’une envie, pleurer tout son soûl.
L’alarme, lancée par une trompette, retentit dans tout le camp.
Veraña se redressa d’un bond et attacha sa cuirasse en quelques secondes, avant d’enfiler ses gants à la hâte. Elle s’empara de son épée et fila dehors, prête à tout.
Elle n’était pas la seule à s’être précipitée dans la cour éclairée par le soleil couchant. Lames dégainées, les soldats ouvrirent de grands yeux en voyant pourquoi l’instrumentiste avait donné de la voix.
Plusieurs soldats, dont un blessé, entouraient un petit groupe de trolls. Ces derniers avaient les poings liés, la majorité avait des estafilades en train de guérir lentement. Huit épées étaient pointées sur leurs bustes.
-Mettez-moi ces sauvages dans la cage, ordonna un lieutenant commandant.
Faire entrer les six trolls dans la cage grise ne fut pas aisé. Un troll parvint à se libérer sans que personne ne sache comment et attaqua le soldat blessé avec une brutalité inattendue. Ses défenses percèrent la gorge du malheureux, et il broya sa cage thoracique à coups de pied. Le sang gicla alentours, jusque dans la bouche du troll. Profitant de l’occasion, une des deux trollesses du groupe débuta une incantation ; une fumée verte et noire fila vers un de ceux qui faisait rentrer un deuxième troll de force dans la cage. La victime se mit à tousser, puis hurla de douleur ; elle tomba au sol et se tordit.
Un marteau surgi de nulle part fracassa le crâne de la trollesse, la faisant chuter.
Les soldats s’écartèrent un instant pour laisser passer le paladin responsable de l’attaque. Son coup s’était révélé parfait ; il acheva la femme d’un second, répandant sa cervelle rougie sur le sol, et invoqua la Lumière sur le premier troll qui avait tué un soldat. Celui-ci tenta d’esquiver la tornade dorée, mais deux épées le transpercèrent au même moment. Il émit un râle et proféra une malédiction ; un carreau d’arbalète, de la part d’une femme postée plus loin, le fit taire pour l’éternité.
Les autres rentrèrent dans la cage. L’humain à terre semblait avoir été libéré du sortilège et reprenait son souffle.
-Personne n’est blessé ? tonna le paladin.
-Personne, Tardien, souffla un officier en regardant l’humain mort. Putain… Ils ont eu un de mes hommes, ces fils de serpent.
Tardien regarda le mort et fit un geste pour le bénir. Il jeta un regard sombre aux trolls restants.
-Pourquoi ne les ont-ils pas tués au combat ?
-Corvin voulait des prisonniers. Il veut les faire parler au sujet de…
Le paladin balaya la phrase d’un revers de main et s’approcha de la cage.
-Si vous tentez quoi que ce soit encore une fois, il n’y aura de clémence pour personne ; suis-je clair ?
Un des trolls se redressa. Il n’était pas immense pour les siens, mais dépassait le paladin ; ses muscles ondulèrent sous sa peau.
-Pas de clémence, répéta le troll dans un commun approximatif. Les loas ils connaissent ça.
Le paladin se contenta de cette étrange déclaration et tourna le dos à la cage. Veraña s’approchait.
-Tardien, vous n’avez rien ? lança-t-elle en examinant avec curiosité les prisonniers.
-Non, Sang-d… commença le paladin avant de se rendre compte qu’il avait complètement oublié son vrai nom de famille. Non, Veraña.
Il avait l’air presque piteux ; la jeune femme esquissa un sourire. Encore une fois, Tardien ne vit que de la bienveillance dans ce regard vert, et qu’une femme au corps tendre sous l’armure. Et puis ses yeux se posèrent sur l’épée qu’elle tenait encore. Il se souvint de l’habileté étonnante de Veraña à la manier, de sa ténacité et de son intelligence au combat. Et pourtant… Aucune autorité naturelle. Le respect que les soldats lui devaient était dû à son rang, pas à sa personne. Il lui manquait quelque chose. Son charisme n’avait rien de militaire. Pas née pour guider. Il détourna le regard.

Veraña, à cent lieues des pensées de son camarade, examinait les trolls. Ils étaient séparés d’elle par d’épais barreaux de métal. La trollesse restante cracha dans sa direction. Ses yeux grenat brillaient sous une chevelure blanche comme neige, qui ressortait sur sa peau bleue. Les mâles marmonnaient entre eux. L’un se retourna, celui qui avait parlé à Tardien. Il posa ses yeux sur Veraña. Ils étaient cerclés de peintures de guerre, incisifs, d’un rouge profond. Il lui jeta pourtant le regard le plus noir qu’elle ait jamais reçu – et pourtant, avec Corvin, elle estimait avoir de l’expérience en matière de regards noirs.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:54

Veraña resserra sa prise sur la garde de son épée. Elle passa sa langue sur ses lèvres sèches, espérant que ses gants n’étaient pas trop abîmés par la transpiration.
-Alors, Sang-de-Loup. Prête, ou vous voulez aller vous remaquiller ?
Il y eut un ou deux rires parmi les hommes ; la plupart ne sourirent même pas. Veraña aurait pu prendre cela pour du soutien, mais pour beaucoup, ils détournaient le regard. Peut-être étaient-ils aussi las qu’elle de ce petit jeu.
La jeune femme maintint sa prise d’une main et posa lourdement sa lame sur son épaulière. Elle s’avança sur le terrain ; il se faisait tard, mais il y avait encore des militaires pour former le cercle relâché des amateurs de belles frappes.
Elle salua sommairement Corvin, qui hocha à peine la tête ; il porta un coup franc qu’elle esquiva, se replia pour frapper d’estoc. Veraña contra le coup, cette fois, s’aidant de son élan pour compenser son manque de force naturelle. Elle tenta de frapper de nouveau, mais son supérieur l’évita sans soucis. Avec le revers du même coup, elle lança une attaque plus brute encore contre ses jambes. Elle érafla le métal, sans faire plus de mal à l’armure que cela. Après tout, si jamais elle le blessait vraiment, elle ne savourerait pas longtemps sa victoire, et elle ne tenait pas à savoir ce qu’il inventerait encore pour la punir.
Son adversaire dut sentir son hésitation et eut un sourire en coin, celui qu’elle n’aimait vraiment pas.
Il se fendit et en deux pas lui fonça dessus. Veraña leva sa garde juste à temps, mais le poids de Corvin lui fit perdre une partie de son équilibre. Il siffla entre ses dents et grogna quand elle contra admirablement bien ses deux coups ; il sentait même très bien qu’elle se retenait de les lui retourner. Plein de rage à présent, il visa la cuirasse puis son visage.
La lame de Veraña lui barra la route à temps. Le son du métal s’entrechoquant leur vrilla les oreilles. Il croisa son regard ; les yeux verts, limpides, soutinrent un autre type d’attaque.
-Fin, Sang-de-Loup, lança-t-il essoufflé.
Veraña obéit et abaissa sa lame, relâchant sa vigilance ; elle aussi reprit son souffle. Il y eut quelques marmonnements appréciateurs, puis les uns et les autres s’éparpillèrent dans le camp, allant prendre du repos ou un tour de garde. Corvin posa sa main sur l’épaulière de la femme comme pour la féliciter et elle retint de justesse un mouvement de recul. Ses doigts gantés détachèrent une courroie de cuir. La gorge de Veraña se serra ; elle avait du mal à comprendre ce qu’il faisait. Il ne la regardait qu’à peine, le visage fermé, les gestes brusques.
Il arracha quasiment son tabard pour le détacher, dévoilant la chemise sous la cuirasse. Veraña fronça clairement les sourcils et tenta de se dégager, mais elle comprit alors que son chef la masquait. Les rares personnes encore autour ne voyaient pas ce qui se passait. Elle ne pouvait pas le désavouer en public.
Les doigts de métal à peine poli se posèrent à la naissance de sa poitrine ; la chemise mouillée de sueur lui collait à la peau. Le tissu se déchira sans problème sous les aspérités du métal, et la douleur qu’elle ressentit lui indiqua qu’il n’y avait pas que le lin qui était abîmé. Il passa sous la cuirasse, appuya sur son sein gauche, déchirant la peau fragile. Un filet de sang tacha son gant. Finalement, il donna un coup brusque sur la blessure tout en la frappant aux genoux avec son pied.
Veraña, déséquilibrée, tomba ; elle se rattrapa de son mieux et fut à peine étourdie. Quand elle tourna la tête, Corvin riait fort avec un autre homme.
-Envoyez un soigneur à celle-là ! cria-t-il en la désignant. Elle a eu ce qu’elle méritait !
-Elle vous a attaqué après la fin du combat ? demanda poliment un soldat.
-Exactement, sourit le militaire en regardant la femme dans les yeux. Aucun honneur.
Veraña se sentit une envie soudaine de hurler, de gronder comme une louve, de se jeter sur lui, de lui enfoncer son épée dans le corps jusqu’à la garde. Elle imagina le sang de Corvin imbiber sa chemise de lin, couvrir sa propre blessure qui la faisait souffrir, dégouliner entre ses seins, embaumer au point d’attirer les bêtes sauvages…
Elle n’aurait plus qu’à jeter son cadavre là où l’une d’elle pourrait se restaurer de chair humaine encore tiède.
Une secousse la fit gémir de douleur et la sortit de ses pensées. Un homme finissait de détacher sa cuirasse, avec des gestes rapides mais doux. Sa robe claire et les motifs dorés religieux laissaient deviner sa fonction.
-Montrez-moi la blessure, demanda-t-il avec douceur. Oh, je vois. J’imagine qu’il s’est défendu maladroitement pour vous toucher ainsi… Mmh. C’est profond. Il vous restera peut-être une cicatrice.
Un peu gêné, il dut terminer de déchirer la chemise pour mettre à nu une plaie luisante. Le prêtre inspira à fond et une douce luminosité émana de ses paumes, qui se propagea au corps de la jeune femme. La Lumière referma lentement la blessure, mais si les quatre lignes laissées par le métal se résorbèrent sans rien laisser, une marque rouge persista à la naissance de la poitrine.
Doucement, avec un linge humide, le prêtre essuya le sang et la sueur ; Veraña ne put retenir un soupir de soulagement quand la douleur s’atténua d’un coup.
-Vous semblez fatigué, remarqua-t-elle en voyant les cernes sous le visage de l’homme. Je ne pensais pas que vous aviez tant de travail au camp.
-Les trolls enfermés me donnent des soucis. L’un d’eux semble malade, surtout à cause de l’enfermement, ils n’ont même pas à boire. Résultat, une infection et ça a l’air de se propager à nos hommes.
-Oh, répondit simplement Veraña en se relevant, troublée. Pourquoi ne leur a-t-on pas donné à boire si on souhaite les interroger ?
-Je ne sais pas.
Le prêtre haussa les épaules, puis étouffa un bâillement et tourna les talons. Veraña le suivit du regard, avant que ce dernier ne tombe sur la cage, éclairée par un des derniers rayons du soleil couchant. Un seul troll était tourné vers elle, et il la regardait directement.
Aucun doute possible. Il la fixait ; elle frissonna ; elle n’était pas sûre de savoir déchiffrer l’expression d’un visage si étrange, presque monstrueux, mais il avait l’air réprobateur. Peut-être était-il énervé contre elle, peu importe…
Le troll posa trois doigts sur son torse, près du pectoral gauche. Il les fit descendre de quelques centimètres sans lâcher Veraña des yeux. Elle plaqua sa propre main au-dessus de son sein, sur la cicatrice. Son cœur battait trop vite. Que lui voulait-il ?
Elle arracha son regard au sien et vit alors derrière lui un de ses semblables, affalé au sol, émettant des râles. La trollesse était accroupie à côté. Elle veillait sans doute sur lui. Le dernier troll dormait contre les barreaux.
Veraña tourna les talons et marcha à grands pas vers sa tente, prise encore d’un frisson. Elle referma sèchement la toile et alluma une chandelle avant de se déshabiller et de poser avec soin son armure sur le côté. Elle était bonne pour se racheter une chemise ; en tant qu’officier, elle devait être bien équipée.
Alors qu’elle ne portait plus qu’un sous-vêtement, elle se perdit dans ses pensées. Son regard erra dans la pièce à peine éclairée et se posa sur son épée.
« Exactement. Aucun honneur. »
Son sang bouillonna de nouveau. Elle ne savait plus très bien si elle avait envie de fondre en larmes ou d’aller se battre.
La chandelle fit rougeoyer une pierre grenat sur la garde de son arme. L’éclat lui rappela irrémédiablement les yeux du troll.
Elle se mordit la lèvre. Plusieurs possibilités s’offraient à elle, et elle savait laquelle elle allait finir par choisir, parce qu’elle était droite comme son épée.
-Ça va finir par te retomber dessus, ma fille, s’admonesta-t-elle toute seule en mettant un pantalon de toile et des bottes.
Elle attrapa une veste sombre qu’elle enfila rapidement et ferma tout aussi vite ; ses doigts sur les boutons bleu marine ne tremblaient pas. Elle moucha sa chandelle et ressortit.
Il faisait nuit noire à présent. Elle ne se préoccupa pas de cacher son visage sous le capuchon de sa veste ou d’éviter les gardes ; elle avança rapidement à travers le camp, ne s’arrêtant que le temps de donner un coup de pied dans une bouteille de vin mal cachée près d’une tente. Le verre se brisa et le liquide fut absorbé par le sol.
-Il a de la chance que j’aie autre chose à faire que le trouver et lui faire passer l’envie de boire ici, murmura-t-elle en se dirigeant vers une tente claire à plusieurs pas de la cage – qu’elle évitait soigneusement de regarder.
Elle se planta devant le tissu.
-Tardien ! Ouvrez !
Elle n’eut pas à patienter dix secondes ; la toile s’ouvrit et le paladin s’avança, l’obligeant à lever un peu la tête. Il avait encore la moitié de son armure.
-Veraña ? Vous avez un problème ?
-Je viens vous demander une faveur, dit-elle sans baisser les yeux. Une faveur énorme.
Tardien fronça un peu les sourcils, interrogateur.
-Je viens vous demander de permettre aux trolls d’avoir un espace… décent.
Les épaulières dorées s’affaissèrent.
-Vous avez perdu la tête. Je ne peux pas faire ça.
-Tardien, supplia-t-elle d’une voix basse et fatiguée. Vous avez le grade pour. On ne traite pas ainsi un prisonnier de guerre, vous devriez le savoir. L’un d’eux est en train de mourir d’une infection, et ça se propage au camp. Faites-le au moins pour vos hommes.
L’homme pinça les lèvres.
-Vera…
-Ils n’ont même pas d’eau ! On ne traiterait même pas une bête comme ça !
-Si je décide de vous écouter, comment réagiront les autres officiers supérieurs demain ?
-Qu’ils protestent, pour voir. Je ne pense pas que notre Roi serait fier d’eux.
Le regard vert de la jeune femme était visible malgré la pénombre. Elle avait forcé sa voix pour y mettre une intonation un peu plus sèche. Elle devait toujours mettre de l’artificiel pour avoir un peu de poids…
-Ce n’est pas si simple, dit doucement le paladin. Si on fait ça, ils risquent de s’évader plus facilement. Ça retombera sur moi.
Veraña lui prit spontanément les mains et approcha tant son visage qu’il aurait pu l’embrasser sans problème.
-Tardien, je vous en prie. Nommez-moi responsable, je m’en fous. Mais je ne peux pas supporter ça… ni votre égocentrisme ! Vous avez peur de quoi, de ne pas avoir d’avancement s’il y a un souci ? Est-ce que les notions d’honneur et de respect ne veulent donc rien dire ici ?!
-Vera, murmura-t-il tout contre elle, vous savez comment Corvin réagira.
-Pour une fois que je me ferai engueuler pour une vraie raison.
Tardien sourit malgré lui ; Veraña relâcha ses mains et recula d’un pas.
-Officier Sang-de-Loup, dit-il doucement, je vous nomme responsable des prisonniers de guerre, de leur état et de leur garde, de leur santé et des conséquences de leurs actes tant qu’ils seront considérés comme tels.
-Je saurai me montrer digne de votre ordre, répondit Veraña en se mettant au garde-à-vous.

Elle ne put retenir ensuite un vibrant « merci » à peine chuchoté avant de filer. Tardien, lui, ferma les yeux quelques secondes. Il ne vit donc pas qu’un des trolls était resté tout ce temps sans bouger contre les barreaux, ses longues oreilles bien ouvertes et ses yeux rouges fixés sur les deux militaires.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:56

-Il faut lui reconnaître ça, elle ne recule pas, fit remarquer un soldat.
Aucun de ses camarades ne lui répondit. Ils avaient tous les yeux fixés sur Corvin marchant à grands pas en direction de leur supérieure, qui restait là, la tête bien droite et les bras le long du corps.
-C’est quoi ce bordel ?! s’écria le militaire.
-L’officier Tardien a pris la décision de donner des conditions de détention décentes aux prisonniers et m’a nommée responsable d…
-Fermez votre gueule ! Vous trouvez ça normal ?
D’un geste large, il désigna une petite enceinte définie par une palissade de bois et de cordes. A l’intérieur, les trolls regardaient la scène avec intérêt. Un petit sourire en coin, presque cynique, jouait sur les lèvres de la femelle.
-Mary a enchanté l’enceinte, ils ne s’enfuiront pas, chef.
-Allez vous faire… commença Corvin avant d’inspirer à fond. Par le sang des Wrynn, Tardien va avoir de mes nouvelles…
L’officier tourna les talons vers la tente du paladin. Veraña s’autorisa à souffler pour évacuer la pression.
-Eh, petite, lança une voix un peu rauque et chantante.
La jeune femme tourna lentement la tête vers la voix du troll ; c’était le mâle qui était malade et se remettait lentement.
-Quand les Loas auront ton âme...
Il se mit à tousser ; pourtant, il semblait rire en même temps, et la trollesse qui se pencha pour l’aider à boire riait aussi. Veraña sentit sa gorge se serrer.
-Sang-de-Loup ! l’apostropha son supérieur dans son dos. Vous restez au camp jusqu’à nouvel ordre pour surveiller vos prisonniers. Bien entendu, s’ils font quoi que ce soit ou qu’il leur arrive quoi que ce soit, vous savez à qui j’irai personnellement demander des comptes.
-Oui, chef, lâcha Veraña.
Corvin parut peu satisfait du visage de marbre de sa subordonnée, et salua sèchement avant de s’éloigner. Veraña prit une grande inspiration.
-Caxey, avec moi, les autres par deux, lança-t-elle d’une voix forte. Joute amicale, mettez l’accent sur la posture défensive, plusieurs n’étaient pas au point la dernière fois.
C’était l’aube, et Veraña était normalement encore au repos. Elle savait toutefois que se lever avec ses hommes, s’entraîner avec eux, pouvait l’aider à gagner leur estime, et retirait un argument à Corvin pour la rabaisser. Cela ne lui coûtait pas.
Le dénommé Caxey, un jeune homme aux cheveux roux et aux yeux noisette, s’avança, un peu hésitant.
-Allez, le provoqua-t-elle, montrez-moi ce que vous avez dans le ventre. Vous avez le soleil dans le dos, en plus, un avantage.
Les armes de chauffe qu’ils employaient pour l’entraînement n’étaient pas suffisantes pour blesser sérieusement un adversaire, mais restaient amplement crédibles. Les deux soldats se saluèrent et empoignèrent fermement la garde.
Caxey se mit en garde et tenta un coup classique, que Veraña para sans aucun effort. Elle se désengagea et frappa à la taille si rapidement qu’il eut tout juste le temps d’esquiver, sans pouvoir répliquer ; un coup vers la poitrine manqua le toucher. Veraña pivota sur elle-même pour éviter une frappe directe, et lança sa lame de façon à le forcer à se déséquilibrer en esquivant. Elle balaya ses jambes d’un coup et sa lame de bois frappa la sienne, qui alla atterrir plus loin dans la poussière. Caxey leva les mains en signe de reddition ; Veraña sourit, son épée pointée sur sa gorge.
-Allez, relevez-vous. Mettez-vous avec Jones…
Elle s’interrompit et tourna la tête ; un rire éclatait, un rire qui n’était pas humain.
-C’est facile face à des enfants, lança tranquillement la trollesse qui venait de rire. Face à une bonne hache de lancer, vous tiendriez pas deux secondes.
Veraña inspira et expira à fond. Elle détourna la tête comme si elle n’avait rien entendu.
-Je disais, Caxey : entraînez-vous avec Jones, et observez bien son jeu de jambes. Le vôtre est un peu faible. Vous ne pouvez pas vous permettre de ne vous concentrer que sur une chose à la fois, il faut être plus polyvalent au combat. Ça vous viendra avec la pratique.
Elle lui tapa sur l’épaule et passa son épée de bois sous la gorge d’un autre soldat.
-Chef, déglutit l’autre, je ne pouvais pas deviner votre présence, là.
-Si si. En étant attentif à tous les détails.
Le soldat, penaud, fronça le nez.
-J’ai loupé quoi ?
-Mon ombre. Elle était juste devant vous, on me voyait l’épée à la main mais vous ne voyiez que votre adversaire principal. Faites attention.
Veraña les éprouva encore une heure, avant de juger qu’ils avaient mérité une pause. Son propre service reprenait dans moins de quinze minutes ; elle plongea comme les autres la tête dans un baquet d’eau fraîche et essora ses boucles noires de son mieux.
-Tu parles d’un « sang-de-loup », grommela un troll en commun pas loin. Aucune férocité.

Veraña prit de nouveau sur elle et ne le regarda pas même pas. Elle partit dans sa tente se changer et revint en armure semi-légère, puisque de toute façon elle était interdite de patrouilles ou d’escarmouches, justement pour avoir préservé la vie de ces êtres.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:57

-Vera ? lança une voix grave qu’elle connaissait bien.
Elle ne répondit pas. Assise sur une petite butte en hauteur, bras entourant les jambes, elle fixait le soleil couchant. Ses boucles noires étaient parsemées de sable et le vent soufflait entre les mèches mi-longues.
Tardien s’assit à côté d’elle maladroitement – il avait peu de place, non pas que la jeune femme en prenne beaucoup, mais le sommet où elle s’était assise était étroit.
-Vous avez pleuré.
Le paladin tendit la main droite. La joue de sa camarade était aussi sèche que le vent du sud, mais des traces de larmes se voyaient encore. Il crut qu’elle ne lui répondrait jamais, puis sa voix claqua, basse et dure.
-Qu’est-ce que vous voulez, Tardien ; je ne suis qu’une femme.
Il retira sa main comme si elle l’avait mordu.
-Que s’est-il passé ?
-Allez jouer les consolateurs ailleurs.
-Vous êtes une battante, je sais… Mais vous pouvez me parler.
Cette fois, la jeune femme garda le silence. Tardien fourragea dans sa chevelure dorée et l’observa. Son cœur se serra.
Les vêtements de toile simple qu’elle portait étaient tachés de sang au niveau de la taille et des cuisses.
-Veraña… Vous vous êtes fait soigner ?
-Non. N’importe quel soigneur m’aurait demandé des explications.
-Et ? Vous ne pouvez pas les donner, ces explications ?
-Il m’a provoquée en duel au dernier entraînement et il n’y a pas que son épée qui a touché mes cuisses.
Tardien sentit la rage et le dégoût monter lentement en lui, lui comprimer la gorge au point qu’il dut faire un effort pour respirer normalement. Si Corvin avait été devant lui à ce moment, il lui aurait fracassé les côtes à coup de marteau. S’il avait pu, il serait allé le chercher et l’aurait forcé à se mettre à genoux devant Veraña, et à demander pardon à la Lumière pour tout ce qu’il lui avait fait subir.
Et pourtant, il ne pouvait pas. Corvin dirigeait le camp ; et il le faisait bien. S’il le décrédibilisait devant ses hommes…
-Ne faites pas ça, demanda Veraña – sa voix se brisa.
-Est-ce que vous me faites confiance ? lui demanda-t-il doucement.
Elle le regarda enfin droit dans les yeux ; il soutint son regard franc, puis baissa la tête pour regarder son pantalon. Elle comprit et s’en débarrassa en quelques gestes saccadés. Malgré ses efforts, il sentit qu’elle souffrait à chaque mouvement.
-Je ne suis pas le meilleur soigneur du camp, prévint-il d’un ton un peu bourru.
-Vous ne ferez pas pire que moi.
Il toucha sa cuisse gauche sans hésitation ; ses doigts rencontrèrent un pansement grossier et imbibé de sang. Il le retira le plus doucement possible, dévoilant deux lésions qui remontaient vers le tissu du sous-vêtement. Il se doutait que des lésions d’une autre nature se cachaient sous le tissu, mais n’y pouvait pas grand-chose.
Il posa ses mains sur la peau nue de la jambe et respira profondément. Veraña le regarda prier la Lumière de la guérir ; quand l’énergie lumineuse apporta à son corps guérison et chaleur, elle en eut le tournis.
Tardien recula lentement ses mains et la laissa remettre son vêtement souillé de sang.
-Que comptez-vous faire ? ne put-il finalement s’empêcher de demander.
-Retourner au camp, dit doucement Veraña en se relevant lentement. M’entraîner me fera du bien.
Elle s’accroupit pour descendre de la butte sans risquer de tomber.
-Merci, dit-elle simplement.

Le paladin la regarda descendre et déglutit ; il avait honte, honte de l’avoir crue moins forte qu’elle ne l’était, honte de ne pas savoir l’aider. Il avait honte de ne pas avoir décidé pour elle d’aller faire payer à Corvin chaque horreur qu’il lui faisait subir.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 9:58

Veraña se sentit moins fragile quand elle ressortit de sa tente en armure et armée. Son épée à la main, elle se dirigea vers le terrain d’entraînement, mais une voix qu’elle commençait à connaître se fit entendre.
-Tu sais que ni toi ni tes camarades ne survivront longtemps aux nôtres… petite fille.
La jeune femme s’immobilisa et fixa un point devant elle sans le voir. Enfin, elle inspira et expira à fond ; son visage se ferma. Elle se retourna lentement et regarda la trollesse. Le peu d’hommes alentours les regardèrent toutes les deux, interrompant momentanément ce qu’ils étaient en train de faire.
-Répète.
-Tu as peur ? susurra la trollesse.
Veraña s’avança jusqu’aux cordes qui reliaient les poteaux de bois entre eux. Elle savait que Mary avait fait du bon travail ; seuls les humains pouvaient passer entre ses liens enchantés.
Un troll cracha dans sa direction.
Veraña ne réfléchit même pas. Elle passa sous une corde et entra dans cette sorte d’enclos, puis dégaina.
-Alors ? demanda-t-elle d’une voix calme mais claire. Vous avez le sens de l’honneur, ou seulement celui de la raillerie ?
Des sifflements se firent entendre. Elle pouvait être sûre que les soldats autour avaient ramené leurs camarades pour assister au spectacle.
Le troll qui avait craché se rapprocha d’elle. Il était bien plus grand qu’elle, plus grand que tous ses camarades ; son long nez se plissa.
-Y’a pas d’honneur à défendre, petite, dit-il lentement, presque en grondant. Mais s’il faut que je me batte sans armes, je le ferai.
Veraña détacha de sa ceinture son propre couteau et le lui tendit. Des murmures  s’élevèrent.
Le troll prit le couteau et eut un mauvais sourire.

Quand il plongea, elle était déjà à côté et assénait son épée sur ses côtes. Il esquiva avec une souplesse de serpent et gronda ; des acclamations retentirent, venant de tous côtés.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 10:01

-Que se passe-t-il ? s’écria Corvin en sortant de ses quartiers ; il terminait d’enfiler à la hâte une chemise blanche, un soldat courant pour le rattraper.
-Il s’agit de Veraña Sang-de-Loup, chef. Elle…
-Où est encore cette salope ?
-Eh bien… Avec les prisonniers.
Corvin s’arrêta de respirer. Il dégagea les hommes qui lui cachaient la vue et sentit ses épaules s’affaisser.
Veraña était effectivement là. Elle se battait avec un troll ; son armure étincelante la protégeait de la plupart des coups, mais son adversaire utilisait en retour une souplesse et une rapidité dont elle ne disposait pas. Ils transpiraient tous les deux, ce qui n’empêchait pas le troll de l’invectiver sèchement.
Elle se battait avec autant de férocité que de finesse. Les hommes alentours étaient visiblement là depuis au bas mot dix minutes et plusieurs brandissaient fièrement le poing quand elle réussissait un joli coup. Le troll pourtant ne l’aidait strictement pas ; il mettait lui aussi toute son ardeur et sa fierté dans le combat, et représentait un sacré défi.
-A vos postes ! cria Corvin, faisant sursauter les plus proches. Vous vous croyez où, bande d’enfoirés ? Vous pensez qu’en cas d’attaque, l’ennemi attendra la fin du spectacle ? Tous ceux qui n’ont pas dégagé dans trente secondes seront consignés dix jours !
Tout en parlant, il faisait le tour et distribuait à l’envi taloches et coups dans les épaules ; les soldats s’éparpillèrent, la plupart en marmonnant des excuses.
Dans l’enclos, Veraña se faisait mettre à terre. Le troll était blessé au torse et à une cheville, et manquait de souffle ; mais il reprit bien en main le couteau pour le passer sous la gorge de la jeune femme, qui faisait tout son possible pour se dégager, sans succès.
Corvin entra lui-même, retira son épée de son fourreau et frappa un grand coup du plat de la lame.
Veraña roula aussitôt sur le côté et bondit pour passer entre les liens de corde ; elle atterrit dans la poussière, mais en sécurité, et s’appliqua à respirer sans tousser. Corvin ressortit à peine quelques secondes après elle.
Il la fixa, l’air partagé entre le mépris et l’incompréhension, mais ne dit rien, ne fit rien. Il lui tourna le dos, épée au poing, et marcha à pas lourds dans la direction opposée. Veraña se demanda vaguement si elle se sentait mal, ou fatiguée, mais ses pensées lui semblaient un peu floues. Sa tête se tourna pour retomber sur le sol ; son regard erra sur les cordages et les trolls derrière. Elle réalisa seulement alors que les trolls la huaient.
Pourtant… Ils ne la regardaient pas. Ils étaient tournés vers la silhouette de Corvin, et elle comprit alors que pour cette fois-ci, ce n’était pas elle qu’ils regardaient avec agressivité.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 10:03

Elle s’était sentie contente quand Corvin l’avait autorisée à sortir du camp pour accompagner une mission, même avec lui, mais se demandait à présent si ce n’avait pas été un piège. Veraña sentit la sueur dans sa nuque se glacer.
C’était une mission de routine, pourtant ; aller vérifier en petit groupe si les éclaireurs allaient bien puis prendre la relève. Ils étaient une dizaine, plus quatre soldats pour les protéger au cas où.
-Continuez, je vous rejoins, lança soudain Corvin, confirmant le pressentiment de Veraña. Sang-de-Loup, vous restez.
Veraña regarda avec désespoir les autres soldats poursuivre le chemin avec les éclaireurs sans poser de questions ; ses épaules s’affaissèrent.
Ils étaient tous les deux seuls dans la forêt environnante. Elle n’osait pas le regarder mais le sentit la contourner, lentement, et arriver dans son dos. Ses yeux allaient de gauche à droite sans le voir.
-Un petit duel, Vera ? susurra la voix moqueuse de son supérieur.
Elle sentit une lame contre sa gorge, juste là où l’armure ne protège pas, pile sous le menton.
-A genoux.
Elle n’obéit pas et resta là, statique. La lame piqua plus fort la peau tendre.
-J’ai dit : à genoux.
Veraña s’agenouilla, faisant entendre le bruit du métal s’entrechoquant. La lame n’accompagna pas son cou et se retira à temps, lui laissant juste une petite estafilade.
-Bien, lança Corvin plus clairement en repassant devant elle. Alors maintenant, vous allez me faire le plaisir de m’expliquer pourquoi vous êtes allée vous battre avec ces dégénérés.
Veraña cilla, puis s’aperçut qu’elle n’avait pas de réponse à lui fournir. Que pouvait-elle dire ? Qu’elle avait répondu à leurs provocations ? Qu’elle avait besoin de se battre après ce qu’il lui faisait subir ? Il n’y avait pas de bonne raison.
-Ça ne vous ressemble pas de garder le silence, Sang-de-Loup. En général, avoir la langue bien pendue ne vous fait pas peur.
Il s’accroupit devant elle et releva son visage d’un doigt ganté ; il rencontra son regard franc et eut un mauvais sourire. Ses yeux gris s’étrécirent alors qu’il reprenait sa dague et chatouillait les lèvres de la jeune femme avec.
La pointe de la dague força sa bouche à s’ouvrir ; il approcha son visage près du sien. Trop près – le rythme cardiaque de Veraña accéléra sensiblement. Elle ne put réprimer un frisson de dégoût quand la langue de Corvin lécha la commissure de ses lèvres.
-Dites tout de suite que ça ne vous plaît pas, murmura celui-ci en posant la dague sous sa gorge.
-Ça ne me plaît pas, répondit la voix rauque de la jeune femme. Vous êtes…
-C’est con, mais j’en ai rien à foutre, déclara son supérieur en la giflant brutalement. Ah, au fait.
Il retira la dague et s’en servit pour déchirer le tabard de Hurlevent qu’elle portait fièrement. Il prit en boule le tissu bleu et or abîmé et donna un grand coup de pied dans la poitrine de la jeune femme.
-Vous ne méritez pas de le porter. Maintenant, rentrez au camp.
Corvin se détourna, sans doute pour rattraper ses hommes ; mais au dernier moment, il se ravisa et dans un mouvement incontrôlé revint vers elle, plaqua ses épaules au sol et tenta de mordre sa lèvre inférieure.
Veraña souffrait. Les coups portés lui faisaient mal et se faire retirer son tabard était pour elle une honte inacceptable. Quand elle sentit le poids de son supérieur sur son corps, elle se débattit et parvint à rouler sur le côté pour lui échapper.
Echange de regards noirs. Elle crut qu’il allait tenter de la tuer, ou d’abuser d’elle, et formula mentalement une courte prière à la Lumière.
Un cri retentit, plus loin.
Corvin se releva et partit au pas de course vers le son ; Veraña s’autorisa à rester assise au sol quelques secondes pour cesser de trembler. Elle se releva lentement et repartit en marchant vers le camp, à tout juste quelques centaines de mètres. Tout le long du chemin, elle s’obligea à ne pas penser ; mais elle avait besoin de faire quelque chose, de faire sortir sa honte, son chagrin – elle essuya plusieurs fois sa bouche.
Elle avait envie de pleurer, mais ne se l’autorisa pas. Elle passa les portes du camp la tête basse, malgré tout son courage, et regarda les trolls enfermés là, dans cet enclos stupide.
Veraña sentit des sanglots lui remonter dans la gorge et la comprimer, au point qu’elle eut mal. Elle entendit vaguement quelques voix qui s’adressaient à elle, mais les ignora. Elle s’avança et passa sous la corde.
Cela réveilla instantanément la trollesse qui dormait ; les autres se redressèrent à demi.
-Ça lui a pas suffit l’autre jour à la peau-rose ? siffla la femelle.
Veraña serra les dents en sentant les larmes lui monter encore et encore aux yeux.
Allez, viens me chercher… je cherche juste à me battre, putain.
-Attend, dit lentement un troll dans leur langue natale. Je m’en occupe.
-Reg, t’es pas armé. Et me dis pas que tu feras des merveilles avec un couteau.
-J’ai dit : je m’en occupe.
Veraña les contempla en fronçant un peu les sourcils ; elle ne comprenait rien à leurs échanges. Elle se remit toutefois en garde en voyant un des trolls se relever… et pinça les lèvres en l’identifiant. C’était celui qui l’avait poignardée du regard le premier jour ; les peintures de guerre autour de ses yeux avait un peu pâli, mais elle aurait reconnu n’importe où ce regard d’un rouge profond. Pourtant, cette fois-ci, il était différent. Pas haineux, ni cruel… Concentré, aiguisé. Dans les mouvements que les prunelles faisaient, elle distinguait de la nervosité et de la maîtrise. Il ne portait qu’un pagne et un collier étrange, barbare.
-Reg, lança-t-il en commun en saluant de façon martiale.
Veraña cilla – il se présentait, comme s’il allait faire un duel avec un adversaire valeureux.
-Veraña, répondit-elle par réflexe.
Quelque chose qui ressemblait à un sourire élargit la bouche du troll ; ses défenses paraissaient plus effilées de près. Veraña regarda sa peau, toute bleue, et les muscles qui la tendaient.
Quand il lui bondit dessus d’un élan, elle eut presque peur. Elle ne plaça pas son épée de façon à l’embrocher, préférant esquiver et parer. Il feinta et parvint à la toucher.
Veraña ne mit pas longtemps à s’apercevoir du point fort du troll : il avait un don pour viser. Il avait un œil hors pair. Sans doute aurait-il fait aussi bien avec une hache ou un arc, d’ailleurs. Elle était constamment sur le qui-vive ; tacitement, ils ne s’engageaient pas dans un véritable duel à mort, mais c’était suffisamment dangereux pour solliciter toutes leurs ressources.
Malgré tout, Reg n’était pas armé, et Veraña parvint à le mettre à terre. Elle lança un grand coup de son épée, n’arrêtant celle-ci que près de sa gorge.
Brutalement, quelque chose s’abattit sur son esprit. Douleur. Colère. Confusion. Le monde était fait de nuances de la peau écorchée des enfants qui se perdent sur les champs de bataille en suivant les esprits des morts.
 
-Non ! cria le troll en se relevant le plus rapidement possible alors que l’humaine s’effondrait. Kuzji ! Non !
La trollesse abaissa lentement les mains devant la fureur de son camarade. Veraña, au sol, roula sur le côté et fixa le ciel avec des yeux éteints.
-Ne fais plus ça, menaça Reg.
-Elle allait peut-être te toucher.
-Si elle avait voulu me tuer elle l’aurait fait dès le début. Son esprit, je veux pas que tu l’attaques comme ça.
Reg maîtrisa sa colère de son mieux. Il savait que Kuzji avait pensé bien faire, mais sachant ce que Veraña avait dû ressentir, il ne pouvait pas rester indifférent.
-C’est une humaine, gronda un troll.
Reg grogna. Il le savait bien.
Quand Veraña parvint à reprendre le contrôle de son esprit et de son corps, elle fixa son regard vert sur lui. Reg s’agenouilla et se pencha sur elle.
-Dors, dit-il en commun. Bien combattu.

Il la souleva de terre avec son armure et son épée et lui fit passer le lien enchanté, se brûlant les poignets au passage.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 10:03

-Dites-moi qu’elle n’est pas là où je pense qu’elle est.
-Eh bien…
-Putain, mais répondez ! ordonna Corvin en finissant de se préparer.
-Elle est engagée dans un duel avec la trollesse.
-Très bien, siffla le guerrier en empoignant son arme. Puisqu’il faut aller chercher cette catin soi-même…
Il bouscula le soldat et approcha à grands pas de l’enclos. Effectivement, Veraña était là. Il avait cru qu’avec le retrait de son tabard, dix jours plus tôt, elle se serait calmée. Mais cette fille était décidément incompréhensible.
Il écarta d’un coup de coude un homme qui regardait le combat. La trollesse s’écartait en soufflant ; elle était blessée. Veraña la laisser s’écarter et se soigner lentement. Elle-même reprit son souffle, avant qu’un autre troll ne lui bondisse dessus. Elle ne dut sa survie qu’à un réflexe rapide d’esquive, les défenses du mâle manquant la toucher.
Corvin jura et passa sous la corde. Il écarta le mâle d’un grand coup du plat de sa lame ; le troll revint à la charge et se posta devant Veraña.
Celle-ci, éberluée, le regarda se positionner comme s’il la protégeait alors qu’il était sur le point de l’égorger dix secondes plus tôt.
-Qu’est-ce que…
-Toi, tu pars, humain, articula le troll. Le combat, il est pas terminé.
Ah, d’accord.
-Ce soldat est à moi, cracha Corvin, furieux. Dégage ou il t’en cuira ! Laisse passer cette femme !
-A toi ?
Reg se retourna et regarda la jeune femme.
-Tu es sa femelle ?
Quelques rires se firent entendre autour de l’enclos.
-Sûrement pas.
-Et tu le laisses te faire… ça, dit lentement la trollesse derrière elle. Moi le premier qui essaie de me traiter comme ça il est sacrifié la nuit suivante.
Corvin esquiva le troll et fonça sur la femelle en chargeant ; malgré le mouvement qu’elle fit pour éviter le coup, il la marqua profondément dans le dos.
-Maintenant, Sang-de-Loup, sortez. Sortez !
-On finira ça, grogna Reg en fixant la jeune femme de ses yeux rouges.
Veraña frissonna malgré elle, tant le regard était intense, voire sauvage. Elle était sûre qu’à présent, elle pouvait craindre pour sa vie.
Bah, elle la risquait chaque fois qu’elle allait se battre avec eux, après tout.
Elle ressortit et s’appuya contre un des poteaux en bois ; Corvin la regarda de haut, respirant profondément. Il lui fit signe en silence de le suivre.
Veraña obéit sans poser de questions, même si sa sueur se congela sur sa peau. Elle avait la chair de poule en entrant dans la baraque qu’il occupait ; Corvin claqua la porte de bois et lui tendit un couteau, le sien.
-Vous avez perdu ça dans l’enclos de ces bestioles.
-Merci, chef, dit-elle d’une voix presque neutre.
A peine l’eût-elle pris qu’il posa la pointe du sien sur sa gorge.
-A l’ancienne, Veraña : sans armures, que le meilleur gagne. Montrez-moi ce que vous valez.
Sans rien ajouter, il défit sa propre cuirasse, se retrouvant en chemise et pantalon. La jeune femme, le souffle court, l’imita. Peut-être tenait-elle là une chance de lui montrer qu’elle valait effectivement quelque chose.
Elle était meilleure à l’épée, mais savait se battre avec une lame courte. Corvin, lui, savait pertinemment qu’il était bon au poignard, et qu’elle le battait – de peu – à l’épée.
Il avait aussi l’avantage du terrain, puisqu’il connaissait ses appartements ; elle, elle se battait quasiment à l’aveuglette, esquivant et frappant de son mieux. Deux fois, elle ressentit une douleur cuisante ; une fois au bras gauche et une fois sur la cicatrice qu’il lui avait déjà faite, au-dessus de la poitrine. Elle parvint toutefois à le toucher, au-dessus de l’aisselle. Un bon coup, qui gênerait les siens.
Quand elle heurta une surface de dos, elle sut qu’elle était coincée et ressentit le début de peur panique qui peut envahir la proie du chasseur. Elle la maîtrisa bien néanmoins, même si son arme lui fut arrachée ; elle voyait encore assez bien, il devait y avoir des chandelles dans le coin. Le regard gris de son supérieur s’étrécit. Il posa sa lame sur le cou de Veraña et s’approcha tant qu’elle sentit son souffle sur le sang qui s’écoulait de sa blessure. Elle tressaillit.
-Fin, Sang-de-Loup.
Pourquoi ne s’écartait-il pas ? Pourquoi ne s’écartait-il pas ?
Elle sentit seulement alors que l’autre main de Corvin était occupée à la déshabiller. Elle serra les dents.
-Ne faites pas ça, siffla-t-elle malgré elle.
Il lui plaqua violemment sa main sur la bouche. Elle donna un grand coup de genou, mais il l’évita, ayant sans doute prévu ce geste. Il déchira sa chemise et écrasa sa main sur son sein collé de sang ; elle réprima un gémissement de douleur.
-Attend avant de crier, chérie, j’ai même pas commencé.
Elle reconnut à peine sa voix tant elle était chargée de haine et tremblait. Elle ne comprenait même pas ce qui l’animait. Elle était juste terrorisée, maintenant.
-Corvin, laissez-moi partir !
Sa propre voix, étouffée par la main, était pleine de sanglots. Elle sentit contre ses cuisses une chaleur dont elle ne voulait pas ; elle eut envie de vomir, violemment.
-Faut que je t’ouvre au couteau pour que tu me laisses te prendre ? souffla la voix de l’homme contre son oreille.
Il retira sa main de sa bouche pour joindre le geste à la parole.
Elle le mordit au sang dans le cou et cracha sitôt après.
-Espèce de… grogna Corvin en retournant le couteau contre elle.
Animée par le désespoir, elle réussit cette fois-ci à lui envoyer son genou dans les parties. L’homme émit un cri de douleur et s’écroula par terre ; elle-même recula, gémissante. Elle s’approcha de l’entrée en osant à peine marcher, et atteignit le placard qu’elle cherchait. Le sang battait à ses oreilles, et ses mains tremblantes eurent du mal à l’ouvrir. Elle se saisit enfin d’une des capes de son supérieur et s’en enveloppa.
Elle sortit et courut vers sa tente. Elle ne vit rien, ni s’il faisait encore jour ni s’il y avait du monde. Elle referma le tissu de sa tente et alluma une chandelle ; elle trempa sa chemise déchirée – la deuxième en un mois – dans de l’eau et pansa ses blessures de son mieux.

Enfin, elle tomba à genoux sur son lit de camp et pleura à chaudes larmes, secouée de sanglots, pendant ce qui lui parut être une éternité.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyJeu 9 Juil - 10:07

Veraña resta officiellement « alitée » deux jours. Sur ordre de Corvin, personne à part un prêtre ne vint la voir. Elle avait de la fièvre, et n’arrivait pas à marcher. Il lui fallut une quarantaine d’heures avant de se sentir un petit peu plus humaine.
Alors qu’elle se reposait, plongée dans un demi-coma agité, la sonnerie des trompettes d’alarme la réveilla.
Elle agit en soldat, par réflexe. Elle se vêtit rapidement, même si ses membres étaient encore faibles, et sortit. Le souffle lui manqua quand elle vit le carnage.
L’enclos, vide ; une sentinelle, morte sur le côté ; une caisse avait pris feu. Les hommes étaient en train de l’éteindre. Le prêtre du camp se penchait sur l’éclaireur, navré.
-Il est mort depuis au moins une demi-heure. Que la Lumière accueille son âme.
Veraña savait que les trolls étaient sous sa responsabilité. On pouvait la condamner lourdement dès maintenant, ou l’expédier en mission n’importe où. Elle se rendit compte que cela n’avait pas beaucoup d’importance.
Elle se sentait brisée. Fragile.
A pas lents, elle fit le tour de l’enclos. Les hommes la laissaient faire, respectueux peut-être, ou alors n’osaient-ils rien dire tout simplement. Elle regarda un des liens enchantés, noirci par endroits. La trollesse. Décidément, elle était douée. Ils auraient dû se méfier de ses pouvoirs dès le tout début.
Elle héla un soldat quand elle découvrit un second cadavre. L’homme chargé de surveiller les armes, un brun qu’elle avait souvent entraîné. Il avait la gorge ouverte, mais le sang ne coulait plus.
-Inventoriez rapidement ce qui manque, ordonna-t-elle d’une voix atone mais audible.
-Je… J’ai l’impression qu’il ne manque rien, chef. En fait, ils n’ont pris que leurs propres armes.
Vrai. Il manquait trois poignards, deux haches de lancer, un couteau sacrificiel et une lance ouvragée. Ils n’avaient pris que ce qui était à eux.
-Donc ils ont repris leurs armes et se sont échappés.
-Le mur d’enceinte au sud, confirma le soldat en baissant la tête.
Veraña posa une main sur son épaule. Le jeune n’avait peut-être encore jamais vu le sang de ses camarades abreuver la terre sèche.
-Chef ! haleta une voix derrière elle. Chef, venez vite !
-Une autre victime ?
Veraña suivit en courant le combattant ; il la guida derrière le groupe de soldats qui vérifiait qu’il n’y avait plus de risque d’incendies, et pointa du doigt un endroit sombre, près d’une muraille trouée – là où les trolls avaient pris la fuite, visiblement.
-Amenez-vous avec une torche, commanda-t-elle.
Elle s’approcha ; elle comprenait ce qui avait alerté le soldat, là aussi il y avait une odeur de mort.
Par la Lumière… puissent leurs âmes me pardonner.
La lumière de la torche éclaira un corps masculin. Le soldat le retourna à la force de ses bras pour exposer son visage.
Corvin la fixait de ses prunelles grises qui ne renvoyaient à présent que la lumière de la torche. Sa gorge était à demi tranchée, et son torse profondément balafré. Son bas-ventre semblait, lui, déchiqueté ; des viscères pourries se faisaient voir, et son intimité avait été sectionnée.
Le jeune qui les avait suivis s’écarta pour vomir son dernier repas. Veraña resta là, immobile, sans rien dire, l’esprit vide. Elle ne savait pas quoi ressentir, entre le chagrin des pertes subies et un soulagement immense mais coupable.
-Ecartez-vous, soldats, commanda une voix puissante dans son dos. Laissez-nous. Passez-moi la torche.
Personne ne discuta. Tardien manqua de souffle en découvrant le cadavre.
-Par la Lumière… Je ne comprends pas…
-Ils ont tué tous ceux qui étaient sur leur chemin. Il n’y a rien à comprendre.
Tardien regarda la jeune femme qui semblait avoir tant pleuré qu’elle n’avait plus une larme dans le corps.
-Justement, c’est cela qui n’est pas logique, dit-il lentement. Regardez.
Il pointa l’enclos, puis la cache d’armes, et le mur d’enceinte. Le chemin semblait tout tracé, simple. En fait, des armes à l’enceinte, il n’y avait que peu de pas.
-Ils ont fait un détour pour passer par ici.
Veraña ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit. Les trolls avaient fait un détour, et la seule raison visible de ce risque était qu’ils voulaient assassiner Corvin.
Assassiner Corvin. Ils avaient pris le risque de se faire prendre pour tuer son supérieur.
-Nous les enterrerons ou renverrons les corps aux familles, dit-elle d’une voix qu’elle ne reconnut pas.
 Elle regarda la torche que portait Tardien. Dans les reflets rougeoyants, elle revit les yeux de Reg, et encore une fois, elle ne sut que ressentir.
-Puisse la Lumière avoir pitié de ton âme, dit-elle en fermant les yeux de Corvin.
-Nous allons les retrouver, promit le paladin.
-Non, Tardien. On n’a aucune chance, ils ont de l’avance et connaissent les forêts. Je ne perdrai pas plus d’hommes à cause d’eux.
-Si je les retrouve…
-Vous vous battrez avec honneur, je le sais, murmura Veraña. Mais en ont-ils manqué, eux ?
L’homme la regarda. Il sentit qu’un fossé s’était creusé entre eux. Il ne se mettait pas à la place des prisonniers, malgré sa bonté ; il ne saisissait pourquoi Veraña aurait commencé à respecter les trolls.
-Je… Vous devriez retourner vous reposer, Veraña. J’envoie sur-le-champ un messager avec les nouvelles, vous devriez être en permission quelques semaines pour vous remettre.
-Parfait, dit-t-elle d’un air de s’en fiche complètement.
Tardien recula et appela les hommes pour venir dégager le corps. Veraña tourna la tête vers l’horizon, et aperçut quelques lueurs. Le soleil allait sans doute bientôt se lever.
-Sois sur tes gardes, Reg, murmura-t-elle.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyMar 8 Déc - 9:27

Deuxième partie




Elle savait qu’il était bien trop tôt, qu’ils n’arriveraient pas avant une petite heure encore, mais elle se précipita quand même à sa cabine dès que la vigie signala que Theramore était en vue.
C’est presque avec frénésie que Veraña s’équipa. Elle avait emmené une armure semi-lourde et une épée qu’on lui avait remise récemment. Une bonne arme, qu’elle avait bien en main et avait vite appris à manier avec dextérité.
-Où en sont les combats ? demanda-t-elle en remontant sur le pont.
-De ce que voit la vigie, lui répondit une naine, l’Alliance se débrouille bien. Nos griffons se font avoir, par contre…
De là où elle était, Veraña ne distinguait que des points dans le ciel qui tombaient en chute libre, mais elle savait que chacun de ces points représentait une monture et un combattant. Elle soupira, frustrée de ne rien pouvoir faire – du moins, pour le moment.
-La Horde recule ! La Horde bat en retraite ! hurla soudain la vigie. Victoire !
-Parfait ! s’exclama le capitaine. Continuez, on les prendra en tenaille et au pire, on aura les derniers fuyards !
Des acclamations retentirent, et Veraña ne put retenir un sourire. Elle avait hâte d’arriver. Elle devrait escorter ses hommes, mais avait ensuite fermement l’intention de filer voir Tardien, qui était déjà en mission à Theramore depuis deux jours. Elle ordonna à son équipe d’aller se préparer et s’accouda au bastingage, impatiente.
Elle voyait de mieux en mieux ce qui se passait sur l’île. Les silhouettes se faisaient plus nettes. Effectivement, la Horde reculait à toute vitesse, s’éloignant de la cité dont elle voyait les tours se dessiner. Veraña pinça les lèvres. Elle n’avait pas participé à un combat en lequel elle croyait vraiment depuis un petit moment. Contrairement à la majorité de ses semblables, elle n’avait pas crié de joie en apprenant qu’elle allait affronter la Horde. Non pas qu’elle ait peur, mais elle avait développé de l’estime pour ses adversaires.
Une estime que la Horde avait fortement réduite en s’en prenant à Theramore. Aussi sa réserve avait-elle vite disparu quand elle avait su pourquoi elle partait se battre.
Quelqu’un la bouscula soudain. Le capitaine, qui brandissait une longue-vue.
-Nom de… Par la Lumière, mais qu’est-ce que c’est que ça ?
Veraña leva aussitôt la tête pour voir ce dont il parlait et resta sans voix. Un zeppelin approchait de Theramore. Il semblait transporter quelque chose, mais Veraña était encore trop loin pour espérer deviner de quoi il s’agissait. Le vent marin agita ses boucles noires, bruissant dans les arbres qui cachaient bien mal le transport gobelin.
Une grande forme volante tourna autour du zeppelin avant de plonger derechef vers la cité, comme touchée par quelque chose.
-Capitaine, qu’est-ce que c’est ?
-On dirait un dragon, même si j’sais pas ce qu’il fait là.
-Je veux dire, ce que transporte le zeppelin.
-Je sais pas. J’ai jamais vu ça… marmonna l’homme avant de se retourner pour crier. Tout le monde à son poste ! Quelque chose n’est pas norm…
Un sifflement retentit derrière eux.  Veraña tourna la tête, et son souffle se coupa, les poumons compressés par l’effarement.
Le bruit… L’onde fut si terrible qu’elle l’étourdit complètement. Elle vacilla, et les lumières violentes achevèrent de la renverser à terre. Elle avait l’impression qu’on avait cherché à submerger tous ses sens et se demanda, l’espace d’une seconde absurde, si elle allait se sentir mourir alors qu’elle était incapable de ressentir quoi que ce soit.
 Toutefois, plus fort encore que ces craintes, elle avait peur pour ce qui s’était passé sur l’île. Un moment d’infini, elle ne sut plus où elle était, incapable de retrouver l’endroit et l’envers de son existence, tombée comme un ange dans un océan blanc et noir.
 
Une sensation. Quelque chose qui la touchait. Quelque chose d’extérieur, à comprendre, et quelque chose d’intérieur – qu’une part d’elle ne voulait pas comprendre.
Une main qui lui agrippait le bras.
Elle hoqueta. Des lambeaux d’étoiles voilaient encore un peu sa vision, mais le mât principal du bateau semblait s’effriter tout seul, comme sous des doigts invisibles et démesurément puissants.
-Relevez-vous, dit-elle sans s’entendre.
Elle-même eut du mal à obéir à sa propre injonction. Elle comprit qu’elle entendait de nouveau quand retentirent les premiers hurlements.
Veraña contempla plusieurs instants le paysage – un paysage d’agonie, dévasté, une mauvaise plaisanterie, un autre endroit, forcément un autre endroit – le temps de vraiment saisir la portée de ce qu’elle voyait. Alors, pour la seconde fois, elle oublia comment respirer. Son cœur avait triplé de volume et menaçait de sortir par sa gorge, écrasait ses poumons, ses tripes.
-Non… bredouilla la naine croisée plus tôt. Non… Par tous les… Non, non, non…
Un mousse à bord s’évanouit tout simplement, son petit bonnet blanc tombant comme une plume sur le pont. Veraña se sentit flotter, le temps d’une longue seconde où elle devait décider que faire. Hurler ? Se laisser tomber à terre ? Tenter de parler ?
Des morceaux de bois tombèrent derrière elle, l’arrachant au spectacle horrifiant. Un de ses hommes se prit une écharde lourde comme une caisse sur le dos et tomba ; elle dut reculer d’un coup pour ne pas subir le même sort. Elle tenta de l’aider à se relever, dans un réflexe simple, mais quelqu’un la bouscula, et elle perdit l’homme de vue. Elle n’entendait pas la voix du capitaine. Elle était incapable de dire si le chaos régnait à bord ou pas. Tout était soit trop flou soit trop net.
Theramore n’était plus en vue. La cité avait disparu, et pas parce que le bateau s’était éloigné. Elle devinait à présent ce qu’avait transporté le zeppelin.
Massacre. Le mot lui semblait faible. Une annihilation. Elle savait que les armées de l’Alliance s’étaient portées au secours de Theramore, que des familles entières vivaient dans la cité. Elle avait marché dans ces rues. Jaina Portvaillant avait beaucoup symbolisé pour elle.
Tardien. Tardien était à Theramore.
Veraña se pencha par-dessus le bastingage, son cœur remontant définitivement dans sa gorge. Elle sentit la nausée la prendre, des larmes lui piquer les yeux et rendit le contenu de son estomac.
A peine s’était-elle péniblement redressée, hagarde, qu’elle s’aperçut que le navire continuait d’approcher. Alors, sans savoir pourquoi elle faisait ça, elle sauta.
L’eau froide, salée et tempétueuse lui rendit immédiatement son instinct de survie. Elle nagea vigoureusement, se félicitant de ne pas avoir pris une armure lourde, et rapidement put atteindre la terre.
Elle marcha rapidement, cherchant des yeux quelque chose. Elle s’aperçut qu’elle avait dégainé son épée et que ce qu’elle cherchait, c’était un visage ennemi.
Elle trancherait avec plaisir n’importe quelle gorge de ces êtres qui avaient à ce point perdu leur âme. Elle cracha au sol le peu d’eau salée qui avait filtré entre ses lèvres. Son armure était mouillée, et dessous le cuir, sans parler de ses boucles noires ; c’était inconfortable. Elle éprouva un vif dégoût envers elle-même pour avoir ne serait-ce que pensé à cela. C’était tellement dérisoire. Rien ne comptait vraiment hormis le carnage pur et simple qui venait d’avoir lieu.
Si vite. Quelqu’un avait-il pu prendre le temps de se préparer à encaisser un tel choc ? N’y avait-il aucun survivant ?
Tardien. Elle devait le retrouver. Le paladin était un homme intelligent et rapide. Il avait forcément eu le temps de se mettre à l’abri… Elle allait le retrouver, au milieu des décombres et l’estomac à l’envers s’il le fallait… Mais elle le sortirait de là. Peut-être aurait-elle l’occasion de sauver quelqu’un d’autre.
Des rires, au loin.
Veraña s’arrêta immédiatement de marcher – alors qu’elle arrivait en vue des premières ruines fumantes – et prit la garde de son épée. Deux orcs, se tapant dans le dos comme s’ils se félicitaient. Les lèvres de la jeune femme se retroussèrent. Quand ils passèrent à moins de trois mètres d’elle, elle se jeta sur le premier en silence, lui enfonçant la lame dans le dos jusqu’à la garde.
L’orc émit un gargouillis et s’effondra ; d’un grand coup de pied dans son dos, elle dégagea son arme de son corps tout en se servant du cadavre comme bouclier. L’attaque du second orc décapita son défunt camarade et il grogna.
-Vous avez perdu. La Horde…
Veraña ne lui laissa pas le temps de lever sa hache et feinta à droite avant de placer une botte qui le mit à terre. Elle lui envoya un grand coup de pied dans l’estomac et posa sa lame sur sa gorge, le regardant dans les yeux en l’enfonçant d’un geste sûr.
Elle abandonna là les deux cadavres et se tourna derechef vers la cité. La fumée autour semblait magique, mais elle n’y connaissait rien. Qu’avait donc fait la Horde ?
Veraña avança encore, les yeux pleins de larmes soudain, mais la main fermement agrippée à son épée.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyVen 11 Déc - 11:08

Il s’était porté volontaire par sens du devoir, absolument pas par envie. Les deux orcs qui avaient également été envoyés inspecter le champ de bataille échangeaient des commentaires à voix basse et il se fichait bien de ce qu’ils pouvaient raconter.
Tu parles d’un champ de bataille. Tout le site n’était qu’une nécropole. Reg aimait les batailles bien menées, avec des plans intelligents et des assauts menés dans l’honneur. Il pensait que tout un chacun dans la Horde pouvait comprendre cela.
Apparemment, il s’était trompé lourdement, et n’était pas le seul.
-Bon, le troll. Tu penses qu’il y a moyen de trouver des trophées ou c’est encore dangereux ?
-Des trophées ? répéta Reg sourdement. Il n’y en aura pas.
Le second orc s’esclaffa, de bonne humeur après cette « victoire » si éclatante.
-On trouvera bien quelque chose de valeur.
Reg serra plus fort ses haches entre ses mains pour ne pas répondre. C’est ce que Vol’jin leur avait demandé. Faire profil bas. Il aurait bien répliqué que sans vrai combat, il n’y avait pas de vrai trophée, mais se tût.
-Il y a déjà les autres qui sont partis devant dans la ville, et deux qui font le tour pour voir si tout va bien, lança le premier orc en faisant des moulinets de sa hache. Tu devrais aller rejoindre les patrouilleurs, troll.
Reg ne demanda pas pourquoi il était le seul à devoir aller les épauler. Il imaginait que ses camarades préféraient aller se délecter de la vue du carnage que leur chef de guerre avait provoqué. Hochant la tête, il les salua rapidement avant de s’éloigner enfin. Les bruits de leurs pas sur le sol défoncé s’estompa avec lenteur, cependant qu’il retrouvait les traces des deux éclaireurs. Il doutait que leur ronde serve à quoi que ce soit. Ce qu’avait fait Garrosh n’était pas destiné à épargner quiconque avait été dans les parages.
Les marques de pas étaient régulières. Il les suivit en parallèle, et tomba brutalement sur deux corps avachis au sol.
Reg se pencha immédiatement dessus, mais il n’y avait rien à faire. L’un des deux était presque exsangue, ce qui n’avait rien d’étonnant au vu d’une grande plaie dans le dos et d’une décapitation nette. Le second, ses cheveux noirs mêlés de sang, avait encore dans la mort une expression féroce, ses yeux rouges mi-clos. Reg posa deux doigts sur le sang encore frais.
Il se releva après avoir examiné les plaies. Aucun doute, c’était une épée qui avait fait ça. Il eut une pensée pour les Loas, leur demandant de trancher avec justesse dans le combat qui venait.
Traquer, Reg connaissait. Il n’aimait pourtant pas ça. Cela lui rappelait d’autres traques, qui avaient été menées dans la jungle aux côtés d’un raptor qui était mort dans la souffrance. Il n’eut toutefois pas à chercher le responsable des meurtres bien longtemps ; au bout de quelques minutes, il repéra une forme mouvante ornée de bleu et d’or.
Pas des couleurs qui passent inaperçues ici. Il raffermit sa prise sur ses deux haches, prêt à en découdre. Son adversaire se dévoila également. Parfait. Viens mourir. Enfin un combat digne d’être appelé combat.
Reg n’attaqua pourtant pas, ne fit pas de geste pour se préparer à lancer une hache. Il ouvrit grand ses yeux entourés de peintures de guerre.
Une femme lui faisait face. Une humaine qu’il reconnaissait. Il l’avait combattue, il l’avait protégée, il avait voulu sa mort. Le visage de la fille était éclairé par deux yeux qu’il avait adorés malgré lui, à cause de leur splendide teinte verte. Ils étaient noyés d’eau en cet instant.
Elle. Par tous les Loas, elle. Pourquoi ? Bwonsamdi, t’as pas eu assez de morts ?
Devait-il la préférer morte à Theramore sans avoir une chance de finir dignement sa vie ?
Elle dégaina lentement, lui laissant une chance de se reprendre et de se préparer. Il se demanda si elle l’avait reconnu.
-Sang-de-Loup ? dit-il d’une voix bien timbrée et basse.
-Reg, cracha-t-elle avec défi en le fixant.
Il n’y avait rien d’autre à dire. Ils étaient ennemis pour la seconde fois, sans rien ni personne pour jeter le doute. Veraña avança encore et Reg se déplaça automatiquement d’un pas sur sa droite. Ils se mirent à décrire un grand cercle, pivotant sans cesse pour se faire face.
-Au moins, cette fois, je suis armé, dit le troll en faisant tournoyer une de ses haches.
-J’aurais dû profiter de l’occasion de la dernière fois et t’assassiner, gronda Veraña d’une voix cassée.
-Et l’honneur ? demanda brutalement Reg.
C’était au nom de l’honneur et du respect qu’elle avait permis aux trolls de ne pas mourir à petit feu dans ce satané camp. C’était ce qui avait permis la construction de ce lien ténu entre des adversaires qui s’estiment.
-Ah ! s’exclama-t-elle en écartant soudain un bras pour désigner Theramore en ruines à quelques pas. Oui ! L’honneur ! L’HONNEUR !
Elle tremblait presque à présent, criant et pleurant en même temps. Reg n’attaqua pas.
-Pour la Horde et son magnifique honneur ! lâcha-t-elle encore avant de s’arrêter à bout de souffle avant de hurler de plus belle. Félicitations pour avoir ANNIHILÉ des INNOCENTS !
Reg ne se méfia pas quand elle s’approcha. Il était désarçonné par son attitude presque ivre et grogna de douleur quand elle porta soudain un coup parfait à ses côtes. Il sentit l’une d’elles se briser et se mettre, très lentement, à se soigner seule.
-Je n’ai pas voulu… commença-t-il avant de devoir esquiver une frappe.
-Cesse de MENTIR !
-Ce qui s’est passé c’est pas en accord avec les Loas, dit-il en contrant difficilement l’épée avec ses haches.
-Rejoins-les, tes esprits, souffla la femme en lui donnant un violent coup de pied dans le thorax. Meurs !
Reg poussa alors un cri de guerre et tourbillonna pour la frapper encore et encore. Elle fut touchée, mais était tellement enragée qu’elle ne sembla pas ressentir le coup. Il sentit la colère enfler en lui.
-Tu as TORT ! Cette bombe je l’ai pas lancée, et tu…
-C’est ta faute s’ils sont morts, répliqua Veraña en comprimant une plaie sanglante à l’épaule. Tous… Les enfants… Tardien !
Reg gronda et attaqua encore, jusqu’à ce qu’elle fatigue. Lui-même était sérieusement touché à deux endroits, mais parvint à se placer derrière elle une seconde. C’est tout ce dont il avait besoin.

Il la frappa à la tête d’un coup puissant. Veraña s’effondra à ses pieds, et la dernière chose qu’elle vit fut les yeux furieux et humides du guerrier.
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MessageSujet: Re: Veraña - Honneur et respect   Veraña - Honneur et respect EmptyMar 15 Déc - 17:45

Reg souffla, plié en deux. Il banda sommairement son biceps gauche qui saignait abondamment, puis se pencha et détacha les épaulières de la jeune femme. Il lui retira aussi sa cuirasse. Elle était bien plus légère ainsi, et il fut frappé de voir à quelle point elle semblait vulnérable.
Il la saisit dans ses bras et se redressa doucement. Il ne pouvait pas revenir au camp comme ça. Soit il la tuait, soit…Soit…
Il n’y avait pas d’alternative. Epargner une humaine sous le commandement de Garrosh, c’était se mettre en danger – peut-être même mettre sa tribu en danger. Pourtant, il refusait de la tuer alors qu’elle était inconsciente.
Sa décision fut prise en un éclair et il commença à courir en la tenant tout contre lui. Il était endurant et se savait capable de tenir bon un long moment. Quand il arriva en vue des marais, il devint paranoïaque. Comment se débrouiller pour filer en douce et en portant l’humaine ?
Il dut retrouver ses instincts de chasseur, bien enfouis. Se faire discret, apprendre à réguler son souffle, à éviter les animaux qui pouvaient se montrer agressifs. Ses muscles finirent par lui faire mal, même si ses blessures étaient à présent à moitié guéries. Veraña ne revenait pas à elle, au point qu’il commençait à craindre d’avoir frappé trop fort.
Manquerait plus que ça. Les Loas ils doivent être pliés de rire.
Finalement, au bout d’une heure de course, il s’autorisa à faire une pause, épuisé. Il grimpa derrière une petite colline et regarda autour de lui. Les marécages étaient sombres et humides, mais il pouvait s’en accommoder. Il posa Veraña sur le sol. Faire un feu était exclu, à cause de la fumée. L’humaine commençait à gémir et ne tarderait pas à s’éveiller. Grommelant, il lui retira ses chaussures et les retourna. Une dague effilée tomba sur le sol.
Les humains ils cachent toujours leurs couteaux au même endroit.
Il la prit et l’appliqua sur la gorge de la fille au moment où les yeux de cette dernière s’ouvraient.
Ce vert, bon sang.
-Qu’est-ce que tu veux ? dit-elle d’une voix faible et rauque.
Il continua de la regarder sans répondre. C’était la première fois qu’il voyait un visage de femme humaine de si près et pouvait l’observer à loisir. Les traits étaient moins anguleux que chez une trollesse. Sa peau crémeuse était beige mordoré. Ses mèches noires étaient courtes mais formaient des boucles au bout. Curieux, il toucha sa joue.
C’était doux, très doux.
-Ne me touche pas, gronda la femme en tentant d’éviter le contact, l’air dégoûtée.
Les défenses de Reg l’effleuraient presque. Veraña ne pouvait pas ne pas le regarder, avec le couteau sur la gorge. Elle se contenta donc de le fixer d’un air furieux. Les lèvres du troll étaient serrées autour des défenses, et ses yeux perçants rougeoyaient.
Veraña souffrait. Elle avait été blessée par le tranchant de la hache au ventre et à l’épaule, et sa tête lui faisait mal. De plus, elle était frigorifiée. Elle allait tomber rapidement malade, c’était certain. Ses dents se mirent à claquer.
-Pas très résistante, dit lentement le troll.
Elle se retint de répondre, mais se sentit rougir de colère. Reg inclina la tête sur le côté et ses yeux se plissèrent un peu. Il semblait presque… se moquer d’elle.
-Si ça t’embête pas, dit-elle à voix basse en tentant de cesser de trembler, je préfère mourir l’épée à la main que crever de froid.
-Du tempérament, ça tu en as hein, grogna le troll en s’accroupissant, maintenant le couteau sur la gorge de la fille. Tu es vivante parce que Garrosh te voudrait morte. Il vous voudrait tous morts.
-C’est ton chef de guerre.
-Mon chef, c’est Vol’jin. C’est lui qui nous guide.
Brutalement, Veraña repensa à Theramore, aux ruines fumantes. Elle n’avait même pas pu voir si Tardien était là. Ses yeux se remplirent de larmes et sa voix se brisa quand elle parla.
-Theramore. Pourquoi Theramore ?
-Garrosh a tué beaucoup des tiens là-bas, déclara le guerrier d’une voix grave. Il peut conquérir encore plus maintenant.
L’expression de Veraña laissa penser qu’elle allait lui cracher au visage, mais elle réprima un violent frisson et se contenta de retenir ses larmes de son mieux.
Le couteau se retira et Reg se redressa un peu. Il retira sa propre armure, bien différente de celle de l’humaine, et resta torse nu. Veraña était incapable de déterminer s’il devait avoir froid ou pas ; elle avait une sensation atrophiée à la température avec ses vêtements mouillés.
Reg se pencha de nouveau avec la dague sur elle. Il fit sauter la boucle de la ceinture de la femme et les lanières de son haut de cuir. Elle s’apprêta à protester vivement, mais il fit mine de la viser avec le couteau.
-Retire l’armure de tes jambes pour que tes jambes sèchent.
Le ton était froid. Veraña s’exécuta, consciente de ne pas avoir le choix. Sa veste boutonnée glissa à terre, la laissant avec un bandeau simple en coton pour couvrir sa poitrine.
Reg posa le couteau non loin, s’assit au sol et attrapa la femme, la ramenant vers lui d’un simple geste. Veraña serra les dents, visiblement prête à se débattre, mais il la plaça directement sous son propre corps.
Elle sentit sa volonté se fissurer. Le corps du troll, tout étranger et révulsant qu’il était, exhalait une chaleur appréciable. Elle fixa le visage de Reg à quelques centimètres du sien.
-Moins froid ? railla-t-il.
-Ça ne sert à rien, marmonna Veraña en frissonnant moins violemment.
-Si je dois te tuer en combat, autant que ce soit un vrai combat. Là t’es comme un bébé raptor au Norfendre.
-Un bébé rap… Non mais ça va oui ? s’indigna-t-elle.
Le rire du troll lui fit découvrir une autre facette de son regard changeant. Sa peau élastique et chaude contre la sienne n’était pas verruqueuse ou dure, comme elle l’aurait pensé. Elle commença à se sentir un petit peu mieux et se troubla en comprenant qu’il faisait peser une partie de son poids sur ses propres avant-bras et pieds pour ne pas l’écraser.
-Si les tiens te voient ? murmura-t-elle, perdue.
-Et les tiens ? riposta-t-il. Je reviendrai vers ma tribu quand Garrosh sera parti fêter sa « victoire » à Orgrimmar.
-Pourquoi dire ça comme ça ? Tu as participé à cette victoire… Tu as permis à…
Le corps du troll se fit plus lourd sur le sien. C’était presque inconfortable à présent.
-On ignorait tout de son plan. Du début à la fin. Et il traite mal – très mal les Sombrelance. Garrosh, il oublie que la Horde elle existe pour qu’on soit libres et pas pour étancher sa soif de sang.
Sa voix était tellement amère et sauvage que Veraña finit par accepter cette idée. Cela ne lui plut pas. Elle aurait aimé le détester, avoir un responsable sous la main, pouvoir faire payer ce massacre à quelqu’un.
Le silence qui s’établit devint peu à peu total, mis à part les sons des marécages environnants. Ils s’observaient sans faire d’autre bruit que celui de leur respiration. Peu à peu, la chaleur du corps de Veraña se confondit avec celle du troll. Reg huma l’humaine. Son odeur était salée, à cause de la mer. Il recula légèrement sans que son corps ne cesse de toucher le sien, son visage au niveau de son cou à présent. Le buste de la jeune femme était plus chaud encore que sa gorge.
Veraña déglutit, tentant de réfléchir sans trouver quoi faire et comment réagir. La part non raisonnée de ses pensées se demanda ce que cela lui ferait si les longues défenses du troll la touchaient. Quand elles frôlèrent sa poitrine, elle cessa de respirer. Ses sentiments passèrent de la crainte au dégoût, puis à une forme d’excitation qui la troubla. Elle se sentit souillée par ses propres émotions.
Reg se souleva complètement, posa une main sur le ventre de Veraña qui fronça les sourcils.
Elle a la peau chaude, plus chaude que moi.
Ses trois doigts passèrent sur le côté, se posèrent sur sa taille. Il réprima un sourire.
-Mais… Mais tu fais quoi ? protesta la jeune femme épuisée.
-J’ai jamais touché de fille humaine. Je regarde si c’est bon à manger.
Les grands yeux horrifiés de la guerrière lui arrachèrent un rire qu’il étouffa rapidement. Vif, il attrapa une de ses jambes, la lui plia, prit son pied nu. Il était si petit.
-Comment vous faites pour avoir de l’équilibre avec autant de doigts ? grommela-t-il.
Reg prit le pied – presque sec, maintenant – et le porta à sa bouche, le passant entre les défenses pour le mordiller comme il l’aurait fait avec un bébé troll pour jouer. Le glapissement que poussa l’épéiste effrayée le poussa à retirer le pied de sa bouche pour juguler son fou rire.
-On ne mange pas les gens, ricana-t-il en la regardant. Pas les Sombrelance. Même si je veux bien te manger toi quand même.
-Que dalle, gronda-t-elle comme un chaton mortifié.
Il voulut se rallonger, mais elle évita son corps d’un mouvement très vif. Il se retrouva étalé de tout son long sur le sol et sentit soudain un poids dans son dos.
Veraña sentit la gêne mêlée d’excitation revenir. Elle tenta d’analyser la chaleur qui envahissait son corps, mais cela pouvait aussi bien signifier la honte que l’envie.
C’est ça. Un troll. Très exotique. Bon sang, mon père me tuerait.
Elle, au moins, n’avait pas de scrupules et pesait sur lui de tout son poids. Elle récupéra d’un habile mouvement son couteau et le lui passa sous la gorge. Reg se figea immédiatement.
-Tu vas me tuer ? dit-il doucement.
-Non, te manger, répliqua-t-elle avec une telle hargne qu’il s’étouffa de rire.
Elle se releva et regarda autour d’elle. Elle allait peut-être éviter la maladie, finalement. La température avait légèrement chuté à mesure que le soir arrivait. Un faible son de corne retentit et elle se figea de même que Reg. Elle tourna la tête, ils se regardèrent.
-Tu sais comment filer ? demanda-t-il en chuchotant presque.
-Je me débrouillerai, articula-t-elle à peine. Dégage. Vite.
Reg reprit ses affaires et les vêtit de nouveau, puis vint vers elle et posa la main sur son épaule blessée. Une douleur aigüe la fit reculer, mais il la tint plus fermement encore. Elle pinça les lèvres alors que son sang se remettait à couler le long de son bras nu.
Le troll plongea deux doigts dedans, et les passa sur son visage. Il traça deux bandes sur son nez,  puis passa le reste du liquide poisseux et chaud sur ses défenses. Veraña le regarda faire en silence. Elle n’était même pas choquée. Cela lui donnait une sensation bizarre au creux du ventre.
-On finira ça, dit le troll en se redressant.
Il lui avait déjà dit ça la dernière fois, mais un doute s’empara d’elle. Parlait-il toujours du combat ?
Veraña préféra ne rien demander. Ce serait moins dur ensuite de le tuer si elle n’avait pas trop partagé avec lui. Elle récupéra son gilet à terre et le referma de son mieux, puis remit les pièces d’armure qu’il lui avait laissées. Quand elle se retourna, le troll n’était plus là. La guerrière soupira, soulagée d’avoir à se concentrer sur quelque chose de concret à présent – revenir vers le camp le plus proche de l’Alliance, qui récupérait sans doute ses morts, sans se faire tuer au passage. Des soins ne seraient pas de trop, aussi.
Tardien… Il faut que je retrouve Tardien.

Elle tourna les talons et s’enfonça dans le marais.
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